lundi 25 juin 2007

Bal de fin d'études scolaires en Ex-URSS.

Le 24 et le 25 juin dans les écoles et les lycées dans toutes les Républiques de l'Ex-U.R.S.S. ont lieu des Bals de fin d'études. Les examens du BAC sont finis. On peut respirer quelques jours avant de se lancer dans un nouveau tourbillon d'examens pour rentrer à l'Université ou collège professionnel, ou tout simplement aller travailler (mais c'est très rare que, quelqu'un qui est arrivé jusqu'au bout, va travailler). Et évidemment cette soirée et cette nuit de bal sont bien méritées. Tout le monde a participé (la direction d'établissement scolaire, les professeurs, les parents, les élèves) pour rendre cette fête inoubliable. D'habitude, la procédure est la suivante: vers 22 heures les élèves de toutes les classes terminales (chez nous elles portent le chiffre 11 et une lettre distinctive A, B, C,D,E... car on compte de 1 à 11 (c'est plus logique qu'en France , à mon avis) avec leurs parents ou membre de la famille, arrivent à l'école, tirés à quatre épingles. Il n'y a plus d'uniformes. Les filles sont en belles robes de soirée, les garçons portent de beaux costumes. Les portes de l'école sont fermées. Cette fête n'appartient qu'à eux! Tout le monde s'entasse dans la salle de réunion d'école, où la partie officielle et solennelle commence. Sur la scène le directeur de l'école (parfois seul, parfois entouré des professeurs) commence à appeler un par un les élèves sur la scène, en les gratifiant de quelques mots, et pour leur décerner le Certificat de fin d'études. Certains élèves reçoivent également une petite boite, avec à l'intérieur une médaille d'argent ou une médaille d'or. Certaines écoles donnent en cadeau pour ces élèves aussi une petite somme d'argent ou un souvenir. Ce sont eux les meilleurs, ce sont eux qui ont bossé dur pendant toutes ces années d'études, ayant les meilleurs notes, en gagnant les olympiades dans beaucoup de disciplines scolaires, en participant activement à la vie d'école. Certains des médailliers d'or sont invités dans la capitale dans le Palais Présidentiel (à Moscou c'est au Kremlin) où le Bal de fin d'études est organisé en leur honneur. Il faut reconnaître quand-meme, qu'il faut montrer les pattes blanches pour y accéder. Celui qui obtient une médaille d'or (le pourcentage d'or est minimal!) doit avoir pendant 10 dernières années les notes trimestrielles et annuelles 9 et 10 sur 10 . Ce qui est noté dans le certificat de fin d'études. Et les notes hebdomadaires qu'il a obtenues ne doivent pas descendre au-dessous de 8. A PRÉCISER: chez nous la note 10 est la plus haute. Celui qui a eu une médaille d'argent (comme moi, à mon époque) doit avoir quasi les mêmes résultats que le médailler d'or, à part qu'il a le droit de "gâcher le tableau" des résultats annuels et ceux de fin d'études avec deux 8. Dans les deux cas, les deux médailliers ont un privilège pour rentrer à l'Université: ils ont le droit de passer un seul examen (car chez nous, pour rentrer à l'Université il faut repasser 4-5 examens spécifiques, concernant la future profession). S'ils reçoivent un 10, ils sont libérés de tout le reste, dans le cas contraire, il faut passer le reste des examens, comme tous les autres... Et en plus, les noms des médailliers vont rester pour toujours gravés dans les annales de l'école, ou plus précisément dans un endroit au mur, tout proche de l'entrée. C'est comme ça que ma fille a découvert pour la première fois, que sa maman possédait une médaille d'argent. Mais bon, revenons à notre fête! Que se passe-t-il après la cérémonie officielle? Après, il y a un petit concert organisé ou bien par les élèves, eux-meme, ou bien par les professeurs.On fait des photos, avec et sans professeurs, avec et sans parents, avec les meilleurs copains... Une fois c'est fini, tout le monde (les professeurs, les élèves et leurs parents) vont "arroser" cet événement dans la cantine de l'école, où les tables sont généreusement garnies avec un buffet. Je ne peux pas vous dire comment ça se passe aujourd'hui, je ne crois pas qu'il y a beaucoup de changement, mais à mon époque, il y avait des tables pour les parents et les professeurs avec des boissons qui échauffent les esprits, et d'autres pour les élèves, sans alcool, à l'exception du champagne, quand-meme. Car vous savez, l'expérience a montré que si on interdisait aux élèves même le champagne, ils se vengeaient sur la vodka, en la consommant en cachette dans les toilettes. Alors, c'est mieux, comme ça. Et puis, c'est quoi une fête sans champagne?!!! Pour préparer le buffet, les parents de tous les élèves ramassaient de l'argent ensemble, et achetaient de la nourriture identique pour tous. Il y avait une équipe de volontaires qui préparait des plats (parfois la cuisine de l'école est utilisée, parfois ça se fait à la maison). Le résultat est souvent très impressionnant. Une douzaine des oeurs-d'oeuvres, des tartines avec du caviar, des amuses-gueules, des fruits, des bonbons, des gâteaux, etc, etc...Quelqu'un qui arrive à l'improviste, sans savoir où il met les pieds, pourrait penser que les parents n'ont pas donné à manger aux "enfants" pendant la dernière année, et maintenant ils se rachètent. Mais, non, je riiigoooooooooooole!!!! Déjà les Slaves sont plus costauds que les autres jeunes gens, alors la question ne se pose même pas, ils ont toujours un bon appétit. Et j'ai rarement vu un gosse qui n'aime pas ceci ou cela... Peut-etre, c'est parce que notre cuisine est super bonne???!!! Je sais, je sais, la prétentieuse, pensez-vous! En réalité, moi, je ne suis pas raciste, même pour la cuisine, j'adore la cuisine française, chinoise, italienne, mais je ne peux pas me passer sans mes plats russes, biélorusses ou ukrainiens. Tout le monde a bien mangé??? Tout le monde a récupéré les forces, laissées pendant les derniers examens??? Alors, il est bien le temps de brûler quelques calories! Tout le monde va dans la salle de sport, où une discothèque est organisée. Des filles dansent avec des garçons, des parents dansent avec leurs enfants et avec les professeurs, les élèves dansent avec leurs professeurs. Tous les échanges sont permis pendant cette soirée. Parfois, la discothèque est organisée par un élève "pro", parfois, l'école invite in DJ. En tout cas, ça danse, ça colle, ça roule!!! Ceux qui ont soif, peuvent redescendre à la cantine pour se rafraîchir. Vers 3 heures du matin, les parents s'en vont à la maison, et pour leurs enfants la nuit de folie continue. Chaque fois, l'école organise une sortie. A mon époque, on a loué un bateau avec un bar et une discothèque à bord, pour 3 heures, qui nous promenait sur la rivière qui traverse la ville. Nous avons tant dansé, que j'étais obligée d'enlever mes chaussures à talons pour ne pas avoir mal aux pieds. Bon courage aux habitants des immeubles avoisinants!!! Mais il faut reconnaître que pendant cette nuit, tout le monde est tolérant. Car tôt ou tard, chaque famille participe à cet événement. Parfois, et surtout maintenant, c'est l'administration de la ville qui organise un show sur la place centrale, avec la musique, les artistes connus, les danses, les illuminations, les fontaines etc... pour tous les élèves de toutes les écoles. Et bien sur, il n'y a pas de fête sans feu d'artifice traditionnel!!!! Aux aurores on peut revenir à la maison et se coucher pendant une ou deux heures, avant que toute la famille soit debout...Mais moi, je suis revenue, une fois mes parents sont partis travailler. Et vous, souvenez-vous de votre fin d'études scolaires?

jeudi 21 juin 2007

22 juin une triste date...

Si je vous dis LE 22 JUIN... Qu'est-ce que cette date évoque dans votre esprit? Deuxième jour de l'été? Michel Berger épouse France Gall en 1976? Napoléon abdique pour la 2ème fois en 1815? La France signe en 1940 l'armistice avec l'Allemagne à Rethondes? Tout ça et beaucoup d'autres... Quant'à moi, dès que j'entends le 22 juin, automatiquement je dis: Hitler déclare la guerre à l'URSS en 1941. Pourquoi?- me demandez-vous. Et bien l'explication est très simple. Si vous me suivez depuis longtemps, vous devez savoir que je suis Brestoise, née à Brest en République de Bélarus, situé à la frontière polonaise. Alors, depuis mon tendre enfance, j'ai été "consacrée" à l'histoire de ma ville natale. A l'école, ayant les manuels d'histoire identiques partout dans l'Union Sviétique, on apprenait l'exploit de la petite garnison de la forteresse de Brest. On était fier que notre ville natale a acquit une renommée mondiale dans les premiers jours de la Grande Guerre Nationale. Rappelez-vous, en 1941, les troupes allemandes pénètrent en Union Soviétique. Staline ne s'attendait pas à ce qu'Hitler rompe le pacte de non-agression signé 2 ans plus tôt. Considérant les Slaves comme des sous-hommes et le communisme comme leur principal ennemi, les nazi mèneront en URSS une guerre bien plus cruelle qu'à l'ouest. Cette attitude jouera en leur défaveur, stimulant le patriotisme russe au sein de toute la population. Et le premier exemple du patriotisme soviétique a été donné aux nazi chez moi, à Brest, dans sa citadelle, qui n'avait déjà plus d'importance militaire. Le 22 juin 1941, à 3 heures du matin les troupes allemandes pénètrent en Union Soviétique, avec 3 millions d'hommes, 3.600 chars et 4.200 avions. L'Armée Rouge au moment de l'offensive allemande est en pleine refonte et au début les troupes soviétiques se replient, mais devant Brest l'armée rouge résiste victorieusement aux assauts des Allemands. 8.000 soldats russes se trouvent face à l'armée allemande de 17.000 soldats qui a fait de la prise de cette citadelle l'un de ses objectifs principaux de cette première journée de guerre! Deux blindés arrivent à pénétrer dans la cour centrale, mais l'un deux est détruit avec canon anti-char seulement manoeuvré par deux servants. Le 24 juin 1941 la Porte de Brest reste aux mains des russes après des engagements aux corps à corps... Le 27 juin les mortiers super-lourds de 540 et 600 mm commencent à pulvériser la citadelle (ils ne seront utilisés qu'à Sebastopol et Brest-Litovsk). Enfin Zoubatchev et Fomine (2 hauts responsables militaires de la garnison) seront capturés. Le premier mourra en 1944 au camp de Hammelburg, le second sera fusillé le 30 juillet devant la Porte de Chelm. Pendant près d'un mois, la petite garnison de la place forte repoussa les attaques d'un ennemi dix fois supérieur en nombre. Aussi longtemps que ses défenseurs restèrent en vie, les hitlériens ne réussirent pas à occuper entièrement la citadelle. 962 soldats et membres de leurs familles ont trouvé la mort ici. Après la guerre, le 8 mai 1965, le Présidium du Soviet Suprême de l'U.R.S.S. attribuera à Brest-Litovsk le titre honorifique de "Forteresse-Héros" et lui décerna l'Ordre de Lénine et celui de l'Etoile d'Or des Héros. Les ruines de la citadelle ont été conservées. Les forts et les casemates à demi détruits, criblés de balles et d'éclats, les murs des casernes et des bâtiments endommagés par les obus, les fossés, les remparts ont été préservés tels qu'ils étaient lors des combats. Un Mémorial a été aménagé sur le territoire de la citadelle. Vous le voyez de loin, surgir au bout de nulle part... L'entrée en forme d'étoile découpée à travers les anciennes fortifications du bastion est très impressionnant. Déjà par ses mensurations, mais aussi par l'ambiance. Dès que vous rentrez sous l'étoile, dans la voûte du passage, vous entendez la voix (la même qu'en 1941) qui annonce en russe à tout le peuple soviétique que l'Allemagne a rompu le pacte de non-agression et a traversé nos frontières à 3 heures du matin, la voix qui appelle aux armes. Tout de suite après, suit la chanson militaire spécialement écrite pour mobiliser la population "à la bataille mortelle" et le bruit des avions et des tirs des chars. Je vous jure, ça donne des fourmies au dos. Vous avancez un peu et vous voyez des centaines des foulards rouges de pionniers accrochés aux grilles des casemates en hommages des gens qui ont péri ici. Il y a toujours beaucoup de fleurs dans les coins différents. Encore aujourd'hui, les vétérans et les touristes viennent de tous l'Ex-URSS pour se recueillir dans cette place. Vous suivez l'allée de goudron de couleur rouge pour avancer au centre. Les guides racontent que cette couleur rouge provient du sang versé par les défenseurs de la citadelle. Le centre du Mémorial est occupé par le monument "Le Courage": le buste d'un soldat défenseur de la place a été sculpté dans un énorme bloc de granit. Gigantesque et pensif, son visage grave et imperturbable, regard profond,il domine le large parc et les ruines de la forteresse en briques rouges. Mon père connaît ces ruines par coeur. Né en 1946, l'enfant d'après guerre, il a grandi juste à coté de la forteresse et venait souvent dans les ruines avec ses copains d'enfance, jouer "à la guerre". Cruel, comme jeu... mais tout le monde voulait être un héros, et par la manque des jouets chacun inventait ses propres jeux. Peut-on les juger aujourd'hui? Je ne crois pas. En plus, ce n'était pas anodin comme jeu, même dangereux, car dans ces ruines il y avaient des mines qui n'ont pas explosé pendant la guerre... Aujourd'hui, mon père pourrait faire un excellent guide, car il connaît non seulement très bien les ruines et les endroits peu connus au large public, mais aussi toute l'histoire de la citadelle et de sa héroïque défense. Mais bon, revenons au monument "Le Courage". A coté, un obélisque de 100m en forme de baïonnette jaillit vers le ciel. Devant ce monument sous trois plate-formes de dalles de labradorite reposent les cendres de 823 défenseurs de la citadelle. Au pied de ce sauveur de la nation en pierre, quatre adolescents (2 filles et 2 garçons) montent la garde devant la flamme éternelle du soldat inconnu. La phrase près de la flamme dit: "Ils se sont battus jusqu'à la mort. Gloire aux héros". L'uniforme est stricte: les garçons portent la tenue militaire traditionnelle de parade de couleur marron clair-kaki et une mitraillette démilitarisée, les filles arborent un tailleur de la même couleur et sont coiffées de deux tresses nouées de rubans blancs (en cas où elles ont les cheveux longs). Ils ont entre 14 et 16 ans et doivent rester 20 minutes, bien droit, sans bouger. C'est un service bénévole que les jeunes gens rendent à leur pays en mémoire des soldats qui ont assuré leur avenir. Quand j'ai été écolière, on se basculait pour avoir la possibilité de garder la flamme dans la forteresse et on était fort motivé dans nos études. Une fois par an, chaque école choisissait parmi les meilleurs élèves de 14-16 ans une douzaine pour les libérer des études pendant une semaine pour accomplir cette mission. Le matin, on allait directement dans une caserne de citadelle, notre QG, pour nous changer, et on procédait au service en défilant au pas militaire (comme dans l'Armée, la jambe tirée en avant) ( Il faut remarquer que l'on s'entraînait bien avant dans la cour de l'école pendant les cours de la préparation militaire; à cette époque je savait défaire en pièces détachées un Kalachnikoff et tout remettre en place en 45 secondes, et même donner le nom à chaque pièce!!! plus maintenant, n'empêche qu'à l'école j'occupais toujours la première place en tir parmi les filles, et à l'Université j'ai été la deuxième!) Il y avait une personne qui faisait les changements de la garde chaque 20 minutes. On mangeait dans la cantine de la citadelle et pendant les pauses repos on se marrait bien. Quelle belle époque! Si on fait un tour à gauche du monument, on peut voir des chars de guerre et des canons. Derrière ce monument principal, au fond du parc, une église orthodoxe, refaite à neuf et fraîchement restaurée, semble être étouffée par son poids. C'est sur les murs de ses ruines que l'on a trouvé après la guerre ces témoignages bouleversants de ses défenseurs: "Nous sommes trois, nous défendons cette église, et nous avons juré de ne pas céder. Juillet 1941" "Je suis seul. Les allemands sont à l'intérieur de l'église. Il me reste une grenade, mais ils ne m'auront pas vivant". Il y a d'autres inscriptions qui sont sauvegardées dans le Musée aménagé dans la citadelle. Il rassemble des armes, des casques, des affaires personnelles, des documents, des lettres des soldats, des officiers de "la garnison immortelle" (ainsi appela-t-on après la guerre les défenseurs de la citadelle). En revenant sur nos pas, vers la sortie, on passe à coté d'une autre sculpture qui impressionne "La Soif" sur la rive du Moukhavets. Pendant la défense de la forteresse, les nazi ont coupé aux défenseurs tous les accès vers l'eau, et les soldats ont risqué leur vies pour apporter de l'eau aux blessés, en rampant vers la rivière sous les feux des mitraillettes allemandes pendant la nuit. Ce monument représente un soldat qui tente d'atteindre l'eau avec son casque. Le casque aujourd'hui est rempli de fleurs, en hommage pour son courage. Brest n'a pas oublié ses héros. Il existe même à la sortie de la forteresse un square près de 3km de long, qui mène au centre-ville et où on peut trouver les panneaux avec les noms des défenseurs. Le premiers panneau dit: "Les rues de la ville portent leur noms". De nos jours, chaque année, le 22 juin ma ville natale organise à l'intérieur de la forteresse des cérémonies commémorant le début de la guerre. Bien souvent le Président Russe en personne et les membres du gouvernement russe sont présents, ainsi que beaucoup de vétérans venus de tous les coins de l'Ex-URSS. C'est pourquoi, j'ai voulu partager avec vous cet événement.